La liberté. A tant la désirer, il avait fini par croire qu'elle n’existait en fin de compte pas. Que ça aussi, ce n'était qu'un mensonge de plus venant s'ajouter à tout ceux que son créateur lui avait raconté en cent ans. Cent ans dans une pièce, attaché, à faire confiance en le seul être qui prenait la peine de s'occuper de vous. Un siècle de belles histoires auxquels il s'était raccroché. Comment aurait-il put savoir? Lui, le vampire dont l’existence était cachée de tous? Lui, le vampire au don qui faisait le bonheur de cet autre qui se fait passer pour un ami, un frère, un père. Naïf, il l'avait été jusqu'au bout. Avait-il eut d'autres choix de toute façon? Non, c'était le seul qu'on lui proposait, qu'il lui proposait. Et comme un enfant qui croit ce que disent les grands, Daniel l'avait crut. Il avait appris à l'aimer, le respecter, le servir. Dans sa petite pièce sombre, il avait apprit à attendre, la solitude ayant été sa seule compagnie de longues heures, de longues années si on les met bout à bout. Attendre le retour de son sauveur, attendre sa nourriture, ou juste un peu de compagnie. Et cent ans c'étaient écoulés, sans qu'il n'en eut conscience. Sans qu'il ne puisse rien faire. Lui qui aurait dût mourir cette nuit d'avril de mille neuf cent quatre-vingt douze. Sauf qu'il était là, vivant - ou du moins c'est ce qu'il lui laissait croire - subsistant grâce au sang des autres. Du sang de cadavres déjà entamés. Mais il s'y était fait. Il s'était adapté à ce mode de vie qui était pour lui devenu si habituel...

Maintenant son créateur était mort, anéantit par ses propres mains un beau jour. Un accident plus qu'autre chose, un geste commis sous une pulsion meurtrière aussi brève que cruelle. Il l'avait affaiblit, puis il l'avait tué. Simplement tué. Puis il avait attendu, longtemps, en vain. C'était la faim qui l'avait poussé à se défaire de ses liens pour quitter cette prison dorée. Cette même faim qui lui avait redonné sa liberté. Pour la toute première fois depuis longtemps, le soleil s'était posé sur sa peau. Une peau pâle, très pâle, trop pâle. Une peau qui au contact des rayons s'était mise a briller et l'avait terrifié. Il avait découvert un nouveau monde. Tout un univers qui lui faisait peur. Mais ne voulant retourner là bas, il s'était concentré sur sa quête de nourriture pour trouver de quoi rassasier son corps. Une chose qui s'était avérée bien plus compliquée que prévu, les humains étant des êtres pourvus de jambes. Il ne savait pas chasser, ayant été domestiqué. Suivant son instinct, il s'était concentré sur des proies plus faciles; les enfants.

C'est ainsi qu'il début le meurtre. Ayant besoin de beaucoup de sang pour survivre, il tuait beaucoup. Beaucoup trop, puis il abandonnait les corps sur place. Un jour, sans prévenir, deux êtres avaient surgis de l'ombre. Ils lui étaient tomber dessus, sans qu'il ne puisse y faire quoi que ce soit. Ils étaient trop rapide, trop fort. A moins que ce soit lui qui était bien trop lent, bien plus faible qu'eux. Arrêté pour non respects de nombreuses règles établies pour les vampires, mais sans qu'il ne comprenne pourquoi, ils l'avaient emmener en un lieu qu'il ne connaissait pas. A vrai dire il n'en connaissait aucun, de lieu. Ce monde étant bien trop grand pour lui. Ce fut dans un château qu'on le conduisit. Un vieux château, dans un endroit où il ne comprenait pas la langue. Sans délicatesse, il fut de nouveau enfermé dans une pièce, avec ce qui semblait être un garde, dans l'attente d'être jugé. Jugé pour quoi? Qu'avait-il fait de mal? Rien à sa connaissance. Rien du tout.

Assis à même le sol, le dos courbé à moitié appuyé contre un mur de pierre, Daniel demeurait immobile, ses yeux toujours bleus malgré sa vampirisation dirigés vers le garde qui depuis son arrivée n'avait pas exécuter le moindre mouvement. Il avait peur. Terriblement peur. Il ignorait ce qu'on attendait de lui, ce qu'ils allaient lui faire. Et il avait faim. Sa gorge lui brûlait. Oui. Il avait faim. Sans crier garde, d'un seul coup il se redressa sur ses jambes, s'élançant à toute vitesse en direction de la porte dans l'espoir de pouvoir la franchir. Peine perdue, le garde l'en empêcha avant même qu'il ne puisse parcourir la moitié de l'espace. Avec une violence non retenue il renvoya la créature contre le mur, la laissant retomber sur le sol dans un bruit sourd. Daniel ne tenta rien d'autre suite à cela, se contentant de se terrer un peu plus dans un angle. Il n'avait pas fière allure à côté de la statue qui avait la charge de le garder. Il était grand, fort, parfait. Lui, il faisait simplement pitié pour un vampire. Des cernes sous les yeux, une apparence maladive, un air de chien battu et des marques à la suite du contact avec le mur. Une larme - trop rare - s'évada de ses yeux et glissa le long de sa joue.

Recroquevillé ainsi avec les vêtements couverts du sang de ses victimes, il ressemblait plus à un humain misérable qu'à autre chose...